L'éloge de la patience, tel est le thème choisi par Maïlys pour ces Vendredis du Vin #63. La patience ne fait généralement pas bon ménage avec la passion, vibrante, urgente, brûlante et... souvent impatiente ! Mais la patience s'apprivoise au fil du temps... C'est un apprentissage parfois presque douloureux, une frustration mais qui peut devenir une lenteur, une attente qui confine à la langueur, avec une certaine volupté ; la patience exacerbe alors le désir et le plaisir et les fait grandir. Il en va en matière de vin comme en toute chose, savoir attendre un vin est un mélange ténu d'exaspération, de tension et de désir qui monte peu à peu, faisant grandir le vin dans notre imaginaire.
Il est une autre patience, celle du vigneron. Attention, persévérance, constance, écoute de la nature, des astres pour certains... Une des vertus essentielles du vigneron. La Patience est précisément l'une des quatre qualités mises en exergue ces jours derniers à Vinisud, lors d'une animation culinaire que j'ai eu le plaisir d'orchestrer et de réaliser sur le thème de la Carte du Tendre de Rasteau, pour les vins de Rasteau : Force, Authenticité, Gourmandise Le tout est alors que le vin ne nous déçoive pas, comme un amant que l'on espère et qui fuit à l'ultime moment ou qui ne s'avère pas celui qu'on espérait. Là, est la vraie limite de l'attente.
étaient les trois autres. Pour chacune de ses caractéristiques, un vin sur chaque journée d'animation. Celui dont je veux parler aujourd'hui est un Rasteau VDN ambré du domaine des Escaravailles. A la tête du vignoble, Gilles Ferran qui a repris depuis plusieurs années le domaine familial et conduit les 40 ha de vignes de Rasteau (des vignobles également sur Roaix et Cairanne, notamment), sur un sol caillouteux et en pente plutôt raide. C'est le domaine situé le plus en altitude à Rasteau, côté Roaix, et on y accède par un chemin escarpé. La patience est récompensée puisque la vue qui domine est sublime !
Le Rasteau VDN ambré TPMG* de Gilles provient de vieilles vignes de grenache blanc vendangées et à la main ; pressurage et fermentation (une dizaine de jours) avant mutage à l'alcool sur moût et non sur grains, donc. Vient ensuite une longue phase d'élevage oxydatif en fût de 225l, durant au moins 4 ans ! Que dire, si ce n'est qu'un tel élevage nécessite la patience du vigneron, mais aussi celle de l'oenophile qui doit attendre 4 longues années minimum l'avènement de ce nectar ! Que dire, sinon que l'oenophile devrait avoir la patience de l'attendre une dizaine d'années (précisons qu'il n'y en a que 700 bouteilles par an !).
Nous n'avons pas attendu autant pour le faire déguster lundi midi
sur le stand des vins de Rasteau, accompagné de baba au sirop de cardamome, crémeux banane, sauce caramel (patience, les
babas sont en train de s'imbiber, de se gorger de suc parfumé !).
Très bel accord en subtilité (dessert peu sucré) avec un vin qui évoque certains spiritueux type Armagnac au nez, tabac blond et mirabelle, abricot et épices douces, infiniment suave ; la bouche est ample et longue et surtout d'une belle fraîcheur avec une finale épicée. Une pure gourmandise en soi ! Quand la patience du vigneron conduit à de telles voluptés, je veux bien patienter aussi.
L'appellation Rasteau VDN fête ses 70 ans, j'espère pouvoir déguster une verticale de vieux VDN, je sais que certains vignerons en ont cachés dans leurs caves...
*TPMG signifie "Tout pour ma gueule", c'était à l'origine une cuvée très... privée :) On en a de la chance que le vigneron veuille bien partager avec nous !
Les VdV sont à retrouver sur facebook ici et là.
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